4-7/6.
J’avoue qu’avant d’y aller, on n’avait jamais entendu parler de Salta. Je ne me rappelle même plus comment on a décidé d’y aller… sûrement un itinéraire indiqué sur le site de Lonely Planet ! Mais depuis quelques semaines à chaque rencontre avec d’autres voyageurs à qui on annonçait notre prochaine destination dans le Nord-Ouest andin, tous ceux qui connaissaient la région étaient dithyrambiques sur la beauté des paysages.
Salta est une ville qui a 2 fois la taille de Strasbourg
mais cela ne se ressent absolument pas quand on se ballade dans les rues du
centre bordées par des maisons basses coloniales. Comme c’est le point de
départ idéal pour explorer la région, on y trouve pas mal de magasins de
souvenirs, d’agences de voyage et de location de voitures. Ainsi sur les trottoirs
se mélangent allégrement les locaux et les touristes en tenue de marcheurs… au
moins notre style vestimentaire se fond dans la masse !!
Durant 4 jours on établit notre camp de base tout en préparant
tranquillement notre itinéraire dans la région à l’Hostal El Relax très bien tenu par un couple charmant d’Allemands, Heinz et Monica. Ça fait longtemps que je n’avais pas parlé de nos
hébergements mais on a particulièrement apprécié celui-ci. Passé la rudeur du
premier contact tout à fait germanique, on a vite fait connaissance autour
d’une bière offerte par Heinz qui
s’exprime en mélangeant l’anglais, l’allemand et l’espagnol !! Mais on le
comprend très bien surtout qu’il n’est pas avare en conseils et le plus
étonnant c’est qu’on finit par parler comme lui !!! Il nous explique
comment échanger nos “blue“ dollars
au cours du marché paralelo (1 USD =
11,20 ARS contre 8) qui est officiellement indiqué dans le journal local !!!
Monica quant à elle nous trouvera une
location de voiture à 4000 ARS pour 10 jours (contre 6500 chez les gros loueurs
du centre) pour une Clio quasi neuve.
Les chambres sont extrêmement propres et on a davantage
l’impression d’être invité chez des amis que de séjourner dans une guesthouse, très bien située à 5 min à
pied de la gare routière et à 10 min de la Plaza
9 de Julio. Cerise sur le gâteau, il y a un jacuzzi que Monica remplit à la demande en proposant
une bouteille de vin de la cave à Heinz.
Je fais leur pub mais ils le méritent amplement et nous
recommandons vivement cet établissement. On y reviendra d’ailleurs à 2 reprises
en revenant du Nord puis du Sud pour faire étape à chaque fois à Salta…
Avec son héritage colonial très bien conservé, la ville ne
manque pas d’attraits et dispose de très beaux édifices religieux comme le Covento San Bernardo ou l’Iglesia San Francisco dont les murs
rouge et or se remarquent de loin et incitent le voyageur à rentrer pour
découvrir ses décorations intérieures et ses images pieuses.
Plus loin sur la Plaza 9 de Julio assiégée par les pigeons, la Catedral de Salta paraît presque plus
discrète avec ses couleurs rose et crème mais c’est avant de se retrouver au
pied de son imposante façade et du portique surmonté de l’œil de la Providence.
L’intérieur est plus ostentatoire et le vaisseau gauche renferme les cendres du
général Martin Miguel Güemes, autre grand héros de
l’Indépendance.
La ville possède plusieurs musées mais on n’en sélectionne
que 2 se trouvant sur la place principale, le Museo Historico del Norte car il est installé dans le très beau cabildo (l’ancien conseil municipal),
regroupant des objets précolombiens, des peintures et des statues de l’époque
coloniale. Mais c’est surtout le Museo
de Arqueología de Alta Montaña (MAAM) qui se révèle le plus “étonnant“,
d’une part par sa collection d’objets appartenant à la culture inca encore inédite dans notre voyage
mais surtout par l’exposé des rites sacrificiels et notamment d’enfants de
“haute naissance“. En 1999, au sommet du volcan Llullaillaco à 6739 m d’altitude (!!!) furent découverts 3 enfants
que le froid, l’absence d’oxygène et la faible pression atmosphérique ont
préservé dans un état “exceptionnel“. A tour de rôle, l’un des 3 corps momifiés
est exposé au public et si ça peut paraître glauque au début, on se laisse
impressionner par l’état de conservation du visage et des membres ainsi que des
vêtements colorés originels qui semblent comme neufs ! Evidemment les photos ne sont pas permises à l'intérieur...
Juste en face de notre guesthouse,
il y a le Parque San Martin d’où
part le teleférico pour arriver au
sommet Cerro San Bernardo. De là, on
a une vue panoramique sur Salta et ce n’est que devant ce spectacle qu’on prend
conscience de l’étendue de la ville ! La descente peut se faire en
reprenant le téléphérique ou à pied en arpentant (à l’envers) le chemin de
croix qui débute tout en bas, derrière la statue monumentale du général Güemes érigée à l’extrémité de l’avenue
du même nom.
Pour découvrir les environs et notamment la Quebrada de San Lorenzo, Heinz et Monica nous prêtent gentiment leur pass pour utiliser le réseau de
bus. Arrivés sur place, nous découvrons que le domaine est “privé“ et qu’il
faut un guide pour explorer la montagne. N’ayant pas prévu le coup, nous
disposons seulement de quelques pesos en poche dont le total est bien loin du
compte pour arriver aux 150 ARS/pers demandés par le bureau du tourisme. Mais
on fait finalement la connaissance de 2 jeunes Canadiennes exactement dans la
même situation et on arrive à s’arranger avec Andres, le tôlier de la boutique de souvenirs et aussi des guides
apparemment, qui finit par accepter qu’on nous emmène en ballade pendant 2h30
pour 80 ARS/pers !!
Le temps n’était pas vraiment génial, la brume avait envahi
les sommets et s’accrochait par endroit à la cime des arbres dont les branches
“chevelues“ rendent l’ambiance digne d’un décor de film d’angoisse. Le guide
nous initie aux spécificités de la flore locale avec entre autres, la
dégustation de la tomate del arbol,
une surprenante variété sauvage qui se mange en aspirant le contenu et dont le
goût se rapproche d’un fruit de la passion !
On croise quelques vaches qui avaient visiblement décidé de
prendre un bain de pattes dans l’eau fraîche de la rivière et nous arrivons au point
d’orgue de la ballade, un mirador offrant
une large vue mais voilée sur Salta ainsi que sur les toits de charmantes
propriétés.
En contemplant le panorama, on remarque très rapidement
derrière nous une étrange sculpture en métal dont le design et surtout la main
ensanglantée tendue vers le ciel me donne un frisson dans le dos. En
m’attardant sur la plaque boulonnée à la base en béton je reste abasourdi à la
lecture des 2 noms qui y sont gravés…
Une semaine auparavant, Adèle et moi prenons le petit-déjeuner dans notre hôtel à Montevideo. On discute de la sécurité des touristes en Amérique du Sud et un article retient notre attention dans le journal du matin. On lit qu’en Argentine, un homme vient d’être condamné à 30 ans de prison pour le viol et le meurtre de deux Françaises, Cassandre Bouvier et Houria Moumni. Deux autres individus étaient soupçonnés d’y avoir pris part mais ils ont été acquittés faute de preuves dans l’enquête bâclée même si j’ignore toujours comment un seul homme peut violer deux femmes !! On apprend que les faits remontent à juillet 2011 et que les deux crimes étaient particulièrement atroces car après leur viol, les deux jeunes avaient été criblées de balles.
C’est bien les noms des deux Françaises que je lis sur la plaque de marbre et la sculpture n’est autre qu’un mémorial car c’est ici, à San Lorenzo, que s’est déroulé ce terrible malheur. On interroge aussitôt notre guide qui est loin de vouloir s’étendre sur le sujet. Il finit par nous avouer qu’elles ont été retrouvées un peu plus bas et que c’est toujours une tragédie incompréhensible pour le village dont le tourisme a pris un sacré coup. Il nous explique que c’est aussi la raison pour laquelle les panneaux incitent à prendre un guide pour se balader dans la quebrada mais là, je suis obligé de sourire : d’une part il n’y a pas vraiment de contrôle (on a vu monter 3 jeunes absolument seuls !) et d’autre part, avant d’être emprisonné, le meurtrier était……… guide !!!
Avant de quitter Salta,
on fera quelques courses au marché et notamment une provision de coca et de bica. Les feuilles cultivées en Bolivie ainsi qu’au Pérou et
pouvant être utilisées dans la production de cocaïne sont en vente libre dans
les provinces de Salta et Jujuy. En les mâchant avec du
bicarbonate de soude, elles ont des propriétés stimulantes et permettent de
minimiser la faim et la fatigue. C’est une tradition chez les Andins et il est
vivement conseiller d’en “chiquer“ pour vaincre le mal des hauteurs.
Au final le goût n’est pas génial, on en a plein les dents
et ça anesthésie la gencive… on préfèrera bénéficier de ses verrues sous forme d'infusion. Outre la
curiosité de consommer de la coca, le
mal de l’altitude est une réalité. Si Salta n’est qu’à 1187 m d’altitude, les
autres bourgades du Nord que l’on visitera se situent pour la plupart entre 2000 et 2500
m avec un passage à plus de 4000 m pour aller jusqu’aux Salinas Grandes. Durant
notre séjour dans la région, nous avons eu plusieurs symptômes : maux de
tête, essoufflements, insomnies et une soif immodérée (d’eau
évidemment !!), mais rien de bien fâcheux…
Dans le marché couvert, les stands sont abondamment fournis,
tout en couleurs et donnent envie d’acheter, excepté les tripes et abats qui
pendouillent dans les boucheries. Au milieu, on retrouve une large food court comme en Asie et je me fais
vite remarquer par “Messi“ voulant
absolument me cirer mes chaussures qui en avaient effectivement bien besoin.
Pas plus haut qu’un hobbit, il nous
dirige joyeusement vers la rue à la recherche d’un siège, en hurlant au passage
à ses copains que « Messi va cirer les pompes à Zidane »… tant qu’il
ne m’appelle pas Ribeiry !!! Evidemment durant toute la durée de sa
prestation, nous parlons de coupe du monde et de son espoir éternel de voir son
équipe nationale remporter le fameux trophée au grand dam de la France. Mais
c’était avant que les Bleus remportent magistralement leurs 2 premiers matchs
et que l’Argentine ait bien du mal à rentrer dans la compétition, dixit Messi,
le vrai !! A suivre...
Quand on reviendra à Salta après notre périple de 10 jours
dans la région, on aura la chance d’assister au Festival de la Patria Grande, où 10.000 gauchos et gauchas paraderont
sur leurs montures dans les rues de la ville en hommage au général Güemes. Chevauchant fièrement et
habillés de leurs vêtements traditionnels, les Hommes de la pampa feront défiler leurs chevaux d’un
pas travaillé et tout à fait élégant. Je m’attarde sur ces visages souvent
marqués par la rudesse de leur vie et dont les joues gonflées trahissent la présence de coca.
On croisera également 2 spécimens d’équidés hors catégorie que j'aurai bien voulu ramener pour permettre à 2 de nos témoins de mariage de faire de l'équitation ^_^
Ce sera une occasion supplémentaire de participer à une fête
populaire qui nous fera aimer davantage cette bourgade aux charmes multiples où
il semble faire bon vivre…
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