Cachi, Cafayate, 12-17/6.
En revenant du Nord, on fait halte pour la nuit à Salta où nous sommes ravis de retrouver le confort douillet de l’hostal d’Heinz et Monica. Nous sommes d’ailleurs les seuls clients à occuper la maison, car cette époque de l’année est vraiment la saison creuse pour l’hôtellerie régionale en attendant les vacances de juillet des Argentins.
Après avoir enregistré les derniers conseils d’Heinz, nous sommes impatients de prendre
le départ pour Cachi et les Valles
Calchaquíes (on nous a au moins
autant parlé que la Quebrada de Humahuaca
et des montagnes de toutes les couleurs ; voir article précédent). Il n’y
a que 160 bornes entre Salta et Cachi mais on met facilement 4 heures pour
faire la distance compte tenu que la route goudronnée laisse place (pour notre
plus grand plaisir) à une piste de graviers pour grimper sur les tracés sinueux
du Parque Nacional Los Cardones.
Ce chemin de montagne, long de 21 km, a
été construit entre 1928 et 1931 dont le point culminant, la Piedra del
Molino, se situe à 3457 m d’altitude où l’on trouve une émouvante chapelle
qui domine toute la vallée. Inutile de préciser que le point de vue est tout à
fait remarquable mais le paysage est totalement différent de ce qu’on a pu voir
dans la Quebrada de Humahuaca. Ici,
point de montagnes multicolores, la roche est noire charbon sur les reliefs les
plus accidentés et les parties déjà érodées par les éléments semblent
recouvertes d’un tapis jaune paille mis en valeur par le soleil de la
mi-journée. Sous nos pieds, on essaye de suivre du regard les innombrables
lacets de la route qui strie les flancs rocailleux et il est presque difficile
de cerner où elle débute, donnant l’illusion de l’existence de plusieurs
chemins…
Une fois au sommet,
on traverse une vaste plaine désertique parsemée de buissons où se perdent des
mules qui posent pour la photo avec en toile de fond des reliefs plus colorés
aux strates bien apparentes. Quelques km plus loin après un petit col, le
paysage change complétement et nous voilà dans un décor de western, sur une
ligne droite interminable au milieu de milliers de cactus géants plantés dans
le sol aride avec des formes aléatoires tels des totems sacrés.
Encore quelques km
et la scène change à nouveau, on retrouve des reliefs en dents de requin, à la
fois rouge, ocre et saumon. L’horizon se dégage et laisse apparaître des pics coiffés
par les neiges éternelles. On amorce notre descente vers la vallée de Cachi
toujours au milieu des cactus, plus petits mais aux “branches“ plus fournies.
Dans le creux des montagnes,
coincée entre deux rio, on découvre Cachi,
une petite bourgade de 2200 âmes à “seulement“ 2280 m d’altitude. Il suffit
d’un tour rapide (il ne pourrait en être autrement !!!) pour tomber sous
le charme de ses rues pavées et de ses maisons blanches au style colonial. Le
temps de reprendre des forces avec quelques empanadas
et du vin local pour ensuite flâner sous les arches du Museo Arqueológico
ou sur le parvis de l’Iglesia San José.
Dans une rue encore
plus tranquille que le reste du village, je découvre ensuite l’hosteria qu’Adèle nous a réservée (Villa
Cardon) qui cache dans sa cour ombragée, 4 chambres absolument ravissantes.
L’établissement vient juste d’être rénové (avec goût) et a nécessité 3 ans de
travaux. Le 1er soir, les jeunes et sympathiques propriétaires nous
ont offerts une bouteille de mousseux local pour notre honeymoon qu’on s’est empressé de déguster pour éviter qu’elle ne
réchauffe (!!!), tout en écrivant un article pour le blog…
De l’autre côté du Rio Cachi, en grimpant sur le chemin de
croix, on arrive sur un plateau qui domine la bourgade et offre une vue à 360°
des environs. C’est là qu’on découvre le cimetière de la ville dont
l’atmosphère est tout aussi émouvante que celui de Maimara (voir article précédent). Il y a des caveaux familiaux en
pisé relativement rustiques mais presque imposants en comparaison des simples tombes
réalisées avec quelques cailloux et de très modestes croix en bois. On ressent
une grande humilité en errant au milieu des monticules de rocailles, la scène
pourrait paraître morbide mais à nouveau des fleurs artificielles colorées
ornent la plupart des stèles et confèrent un cachet unique à l’endroit et qui
nous empêchent d’être……… tristes !
La suite de notre
parcours restera sûrement gravée à jamais dans nos mémoires ! On emprunte
la Ruta Nacional 40 que notre loueur
de voiture appelait joyeusement le « Paris-Dakar » puisque la route,
qui n’en a que le nom, est en fait une piste de graviers quasiment tout le long
des 160 km des Valles Calchaquíes qui mènent à Cafayate. Le plus
hallucinant est que ce tronçon de la Ruta
40, qui traverse toute l’Argentine du Nord au Sud sur plus de 5100 km, est
en réalité une route des vins tout à
fait exceptionnelle ! On effectue un petit détour à Molinos (900
hab.) qui marque le début du parcours avec ses charmantes ruelles ombragées et
sa pittoresque Iglesia de San Pedro de Nolasco qui se distingue par des
clochers jumeaux ainsi qu’un toit en bois de cactus. Mais curieusement, on ne
voit pas de vignes…
A la sortie du
village, on s’arrête pour charger un couple d’autostoppeurs qui partage notre
destination. Après des présentations en Anglais, il s’agit en fait de 2
Français, Manon et Léo, étudiants en agronomie et
normalement en stage au Chili mais s’offrant 2 semaines de vacances en
Argentine. Manon est spécialisée en
œnologie et une grande discussion commença dans la voiture sur le sujet avec
des explications très intéressantes sur les cultures locales et en prime, des
bonnes adresses de caves pour notre séjour prochain au Chili !
Le reste du parcours
s’apprécie en photos car je ne saurai décrire les panoramas que l’on a rencontré
sans abuser des superlatifs habituels ! Mais il faut s’imaginer rouler sur
une piste poussiéreuse sans dépasser les 50 km/h, traversant des villages en
adobe qui semblent désertés par sa population et des paysages dont la beauté
augmente crescendo après chaque virage. A la fin de chaque arrêt photo je
reprenais la route, satisfait par le sentiment d’avoir réalisé un cliché d’un
décor sublime et je ne voyais pas ce qui pourrait être plus beau… à peine
quelques centaines de mètres plus tard, j’aurai pu m’arrêter à nouveau,
époustouflé devant une scène encore plus grandiose !!!
Au final, nous avons
mis plus de 5h pour rallier Cafayate !! Le plus étonnant sur cette route
des vins qui est jalonnée de panneaux indiquant les différentes bodegas, est que l’on a quasiment pas
aperçu de champs de vignes. C’est Manon
qui nous expliquera par la suite que les domaines qui bordent cette route sont
de petite taille et que les vignes sont situées davantage sur les hauteurs à
l’abri de la poussière de la piste. Ce n’est qu’en arrivant à quelques
encablures de notre destination qu’on retrouve le goudron sur une route qui
traverse d’immenses champs viticoles.
Cafayate est la
capitale du Torrontès, un cépage
produisant un vin blanc sec aromatique. Les bodegas
sont nombreuses et on se dit que le week-end va être chargé ! Mais en
prenant des renseignements sur les horaires de visite et de dégustation, on
apprend qu’elles sont toutes fermées le dimanche !!! Avant la fermeture,
on se précipite à la Bodega Nanni que Heinz nous avait conseillée et qui produit du vin organique. Le
tour ne se fait pas sur le domaine mais en ville où l’on presse et fermente le
raisin. Cette maison familiale assure une production limitée uniquement
commercialisée dans la région de Salta et un peu au Brésil via un distributeur
“historique“.
Photo ci-dessus : Bodega El Esteco, malheureusement fermée lors de notre passage.
Durant tout le WE,
on noiera notre chagrin chez les restaurateurs du centre en testant à chaque
repas, une autre bodega du
coin ! Sans compter les dégustations supplémentaires qui ont accompagné
les matchs respectifs de la France et de l’Argentine de cette coupe du monde
2014.
Le dimanche, on profite du panorama offert par notre estancia (Paris-Texas), située sur les hauteurs, à l’écart de la “ville“,
avant de prendre la route de la Quebrada
de Cafayate. A une quinzaine de km, on se retrouve au milieu d’un décor aride
digne des plus beaux westerns. Des formations de roches surréalistes bordent un
rio asséché dans lequel on improvise
une marche de plus d’une heure et nos yeux ahuris ont du mal à focaliser très
longtemps sur un seul et même endroit. En grimpant sur les collines
accessibles, je tourne sur moi-même et j’ai du mal à m’arrêter de photographier
chaque relief dont le rouge vif tranche très nettement avec le bleu du ciel.
En reprenant la voiture pour parcourir encore quelques km,
on découvre que le spectacle continue plus loin pour notre plus grand
bonheur !!
C’est avec nos têtes débordant d’images sublimes qu’on
rentre sur Cafayate pour visiter l’excellent Museo de la Vid y El Vino. Ce musée tout récent est une excellente
initiation à la culture vinicole locale depuis que des moines franciscains ont
effectué les premières récoltes pour assurer la production de leur vin de
messe. On y apprend les méthodes de fermentation, les cépages et on découvre
l’ensemble des bodegas de la région.
Le musée dévoile également quelques secrets du vin local : haute altitude
(les domaines les plus élevés se situent à Payogasta,
3015 m), grande amplitude thermique entre le jour et la nuit (plus de 20°) et
une terre argileuse irriguée par une eau très pure provenant des glaciers.
De l’autre côté de la Plaza
Principal, on fait une toute autre dégustation à la Casa de las Empanadas où l’on commande les 12 sortes disponibles
accompagnées du vino de la casa.
Le dernier jour devait être consacré à la visite d’une ou
deux bodegas le matin avant de reprendre la belle route goudronnée passant dans
la Quebrada de Cafayate et qui file
jusqu’à Salta en un peu moins de 2h30... Au lieu de cela, au moment d’acheter
du vin chez Nanni la veille, on se
rend compte que je n’ai plus ma CB !! On réfléchit au dernier endroit où on
l’a utilisé et on se rappelle le petit restaurant sur la place de Cachi. Je
revois la scène dans ma tête au moment de régler l’addition et je me rends
compte que le serveur ne m’a jamais rendu ma Visa. On file à l’hôtel pour
appeler le resto et checker qu’ils ont bien ma carte. La bonne nouvelle est
qu’ils ont bien gardé ma CB, la mauvaise est qu’il faut se retaper la même
route qu’à l’aller, c’est à dire 4h de piste jusqu’à Cachi et ensuite 4h pour rejoindre Salta via le Parque Nacional Los Cardones, damned !!
Heureusement que les paysages sont magnifiques et que je ne suis que légèrement
désappointé de faire la même route dans l’autre sens. Cela ne m’a pas empêché
de m’arrêter à nouveau pour faire d’autres photos…
Au final au lieu de
8h, on ne mettra que 6h30 pour effectuer notre pittoresque détour. C’est là que
j’ai compris l’allusion du loueur lorsqu’il surnommait cette route le
« Paris-Dakar » car malgré ses prédispositions citadines, notre
modeste Clio, poussée par mon impatience agacée, s’en est très bien sortie…
Waw! Encore de superbes photos!!
RépondreSupprimer