León, Las Penitas, 25/2-3/3.
On a toujours reproché au Costa Rica son absence d’héritage des conquistadors et notamment l’architecture qu’ils ont apportée avec de très nombreuses églises. Bien qu’après notre périple en Amérique du Sud, on ait eu notre dose de Maisons de Dieu, la rupture nous avait fait tout drôle lors de notre arrivée à San José. Au Nicaragua, les choses semblent s’arranger car après la capitale, nous prenons la direction de León. Pour cela rien de plus facile, il suffit de rejoindre le terminal du Mercado Israel Lewites et de grimper dans un minivan qui fait la course pour 51 cordobas (env 2$). Mais la place est comptée et nos imposants bagages doivent eux aussi s‘acquitter d’un billet car ils prennent la place d’une personne !!
A León, l’énorme
terrain vague au nord de la ville qui sert de terminal est un joyeux bordel
organisé. Des minivans arrivent de tous les côtés, des “chicken bus“ sont stationnés dans un ordre improbable et au milieu
de tout ça, des gamins en pousse-pousse cherchent le client fraîchement arrivé.
On négocie le bout de gras avec l’un d’eux, en fait le prix est aussi cher
qu’un trajet en taxi mais notre jeune garçon remporte beaucoup plus de mérites
à nos yeux, car les rues pavées, les nids de poule et les faux plats rendent
l’exercice bien sportif qui lui vaudra une bonne suée. D’autant plus avec nos
55 kg de bagages qu’il avait sous-estimés !
La ville de León a
été initialement construite au pied du Volcan
Momotombo par Francisco Frenandez de
Cordoba en 1524. Mais en 1610, elle fut totalement détruite par un séisme
résultant de l’intense activité du volcan. Elle fut reconstruite 30 km plus
loin, dans une zone moins exposée. León
fut la capitale nicaraguayenne jusqu’en 1852 et accueillit la première
université du pays en 1912. Il suffit de fouler le Parque Central pour constater que la ville est envahie par la
jeunesse, des collégiens et des étudiants squattent les bancs, les trottoirs et
la fontaine au centre de la place.
Le temps de déposer nos sacs à dos à l’hostel El Malinche et on se lance dans un
rapide tour de la ville alors que le soleil rasant illumine la Iglesia de El Calvario et on arrive
juste à temps devant la Cathédral
avant qu’elle ne baigne totalement dans l’ombre. Ce premier coup d’œil nous
permet déjà d’apprécier l’architecture de la ville qui a quelque chose de La Havane. Ces haciendas aux façades
décrépies jadis colorées possèdent un charme fou. A l’heure où l’on cherche un
bar pour prendre un drink avant le dîner,
les habitants ont sorti les rocking
chairs sur le seuil de leur maison et discutent entre eux. Bien souvent, on
retrouve trois générations assises les unes à côté des autres. Même à
l’épicerie où l’on préfère finalement acheter une bouteille de Flor de Cana et du ginger ale, trois petites vieilles assises sur leurs chaises à
bascule nous barrent le passage de l’entrée de la boutique. Au lieu de nous
laisser entrer, l’une d’elles nous demandent ce qu’on désire. Une fois notre
commande passée, cette dernière hurle en espagnol l’objet de notre achat et une
jeune fille à l’intérieur s’exécute pour nous ramener notre précieux flacon
ainsi que le soda. Efficace mais pas très commerçant car on aurait pu être
intéressé par autre chose mais ici, la vente additionnelle n’est pas enseignée
aux tenancières d’épicerie de quartier !!
Iglesia de El Calvario
Cathedral au coucher de soleil
Le lendemain, on arpente à nouveau les ruelles pavées et
très vite, on s’attarde à jouer les curieux en zyeutant à l’intérieur des
haciendas qui renferment bien souvent un magnifique patio fleuri au centre
duquel on trouve une fontaine en pierre volcanique. Il fait très chaud, il n’y a pratiquement pas d’air et on
avance à la vitesse d’un grand-père en déambulateur !
Comme ça nous manquait (!!!), on fait la tournée des églises
dont toutes datent du XVIIIe : Iglesia
de la Recoleccion, Iglesia de la
Merced, Iglesia de San Francisco
et bien d’autres en plus ou moins bon état. Le Covento de San Francisco juste à côté de l’église du même nom a été
reconverti en hôtel, où il fait bon boire un rafraîchissement à l’ombre des
terrasses du hall magnifiquement restauré, tout en admirant le jardin de la
cour, tout aussi superbe !
Iglesia de la Recoleccion
A gauche, Iglesia de la Merced. A droite, Iglesia de San Francisco
Hôtel El Covento
Le principal centre d’intérêt architectural est bien sûr la Cathedral de León, l’une des plus
grandes d’Amérique Centrale et inscrite au Patrimoine Mondial de l’Unesco. Sa
construction de style néoclassique a débuté en 1747 et a nécessité plus d’un
siècle pour être enfin achevée. L’extérieur et ses façades noircies contrastent
avec la blancheur de l’intérieur, relativement sobre pour un édifice religieux
d’Amérique Latine.
Près du cœur, l’un des piliers de la coupole abrite la tombe
de Rubén Darío, l’enfant chéri
de la ville. Le poète a grandi trois blocs plus à l’ouest dans une maison
devenue aujourd’hui un musée qui expose ses effets personnels ainsi que ses
poèmes. L’artiste y passa ses derniers jours avant de s’éteindre en 1916.
Encore plus immaculé
que l’intérieur, le toit rénové de la cathédrale est tout à fait
impressionnant. On peut d’ailleurs le constater de très près puisqu’un étroit escalier
dans l’un des clochers mène jusqu’au sommet de l’édifice. Une fois sur le toit,
les lunettes de soleil sont indispensables tellement on est ébloui par la
réverbération du soleil. On a l’impression d’évoluer dans un village
hellénique !! Le contraste entre le blanc et le bleu du ciel, parsemé de
seulement quelques nuages, est d’ailleurs saisissant… et sublime ! Le
support est tout trouvé pour se lancer, Adèle est moi, dans une battle de photos.
Du point le plus
haut, autour de la coupole, on repère facilement les autres églises visitées
précédemment, les toits du mercado
central ainsi que les volcans à l’horizon comme le Momotombo, le Cerro
Negro ou la Cordillera de los Maribios. A l’opposé, on a une vue
d’ensemble du Parque Central ainsi que des bâtiments qui le bordent (Colegio
La Asuncion, Palacio Epsicopal…).
A gauche, Colegio La Asuncion. A droite, Palacio Epsicopal
Cette ville progressiste a également été le théâtre d’un bon
nombre d’évènements durant la révolution. C’est ici que les premières
manifestations d’abord pacifistes se sont organisées et devant la répression de
la dictature de Somoza, la résistance
s’est ensuite organisée et armée pour combattre le régime. On découvre toute
cette période en visitant le Museo de la
Revolucion, grâce à toute une série de photos en N&B. L’édifice est
bien délabré, les expositions sont assez sommaires mais tous les guides sont
d’anciens combattants et racontent l’histoire de la révolution avec passion. De
la création du FSLN par Carlos Fonseca aux légendaires combattants
comme Che Guevara, en passant par les
dirigeants des pays “amis“ tels que Chavez
ou Castro. La galerie de portraits
est complétée par les héros locaux, tous morts au combat ou assassinés, dont de
nombreuses femmes qui se sont particulièrement illustrées durant la guerre.
Outre la cour intérieure du musée, on trouve un peu partout
dans la ville des fresques murales rendant hommage aux soldats et à leurs
leaders emblématiques. Contigus à la place centrale, autour du Mauseleo de los Héroes y Martires, des
guides improvisées expliquent la symbolique des peintures comme ce pistolet
posé sur une lettre signée par le poète Rigoberto
Lopez Perez. Ce dernier, déguisé en serveur, fut l’auteur du coup de feu
fatal au dictateur Somoza dans une
maison de la ville. Cette lettre est son dernier écrit où il déclare ses
intentions.
On peut compléter par la visite de la Fundacion Ortiz, une collection privée très hétéroclite avec des
céramiques précolombiennes, des œuvres contemporaines d’artistes nicaraguayens
ainsi que quelques toiles ou croquis de maîtres européens comme Chagall ou Picasso.
Outre les expositions, on apprécie la rénovation magnifique de plusieurs
maisons assemblées qui font offices de musée. Aussi, nous ne sommes pas étonnés
d’apprendre que c’est la même famille qui possède le Covento de San Francisco reconverti en hôtel.
León est
exactement le type de ville coloniale qu’on aurait aimée trouver au Costa Rica.
Certes la plupart des bâtiments sont en mauvais état et la pauvreté est
toujours présente mais il se dégage une réelle authenticité. L’héritage
espagnol, son architecture et les évènements liés à la révolution achèvent de
lui donner un cachet qui a su nous séduire très rapidement. Et nous ne sommes
pas les seuls, vu le développement récent des restaurants étrangers et
établissements hôteliers un peu partout dans la ville !!
L’autre avantage de León
est que cette ancienne capitale n’est située qu’à 20 km des plages sauvages de
la côte Pacifique. C’est pour nous l’occasion d’emprunter notre premier “chicken bus“, un ancien car scolaire
généralement importé des Etats-Unis ou du Canada, largement modifié et
customisé. Le moteur n’est évidemment plus celui d’origine, la majorité des
aiguilles des cadrans du tableau de bord restent immobiles, la boîte
automatique a été remplacée au profit d’une manuelle, moins chère à entretenir
et moins gourmande en carburant. Quant au bruit de l’échappement (libre), il est
judicieusement couvert par les watts de l’impressionnant soundsystem qui équipe l’intérieur du bus.
Encore une fois, la place est comptée et il vaut mieux arriver en avance pour
avoir une place assise. Sinon le voyage est à faire debout, serré comme des
sardines, car l’assistant du chauffeur rentabilise chaque cm2 de l’espace
disponible. Même quand on pense que le bus est plein et qu’il est impossible
d’accueillir d’autres passagers, le bus s’arrête toujours et encore à chaque
client potentiel sur le bord de la route ! Finalement, sous les hurlements
de l’assistant, chacun se colle encore davantage contre son voisin. Ce n’est
pas sans nous rappeler la fréquentation aux heures de pointe du métro de
Beijing…
Il n’y a évidemment aucune place à l’intérieur pour les
bagages et nos sacs à dos filent sur le toit, au milieu des vélos, des cagettes
de fruits et des matériels de construction.
Petit conseil à ce sujet : le “ticket“ se paye à l’intérieur du bus une fois que ce dernier a effectué quelques km. Si on désire sortir avant que l’assistant récolte l’argent, il suffit de régler à la descente du bus. Donc, méfiez-vous des porteurs qui chargent le toit au terminal et qui arnaquent le touriste en demandant le montant du ticket. Par ailleurs, chaque chauffeur est responsable de la marchandise qu’il transporte, notamment en cas de vol ou de perte. On a ainsi entendu le récit d’une touriste allemande qui s’est fait remboursée (après moult discussions) la somme de 300$ en dédommagement de son sac à dos qu’un malotru a dérobé sur le toit. Debout et serré contre ses voisins dans l’allée centrale, on a aucune visibilité sur ce qui descend du toit et il serait difficile de rattraper un voleur qui s’enfuit avec son backpack. Sauf pour le mien peut-être pour lequel le gars a intérêt à être sacrément balaise pour courir plus vite que moi avec 22 kg sur le dos !!!
On rejoint ainsi les villages de Poneloya et Las Penitas.
On s’y pose pour quelques jours avec au programme……… pas grand chose ! On peut
y faire du surf mais les vagues sont assez modestes et quelques précautions
sont nécessaires car les courants assez forts sont responsables de plusieurs
morts accidentelles chaque année. Le bus termine sa route à la Barca de Oro où l’on occupe un bungalow
“écologique“. Totalement construit en bambou et palme, son alimentation est
assurée par l’énergie solaire et dispose de “toilettes sèches“ qu’on n’avait
plus eu le plaisir d’utiliser depuis notre séjour dans une yourte en Mongolie.
On profite de ce séjour pour rattraper le retard de
rédaction du blog et on procède à un gros tri dans les photos qui ne sont pas
loin de saturer mon DD externe, le troisième si l’on compte celui du
MacBook !!
Outre le spectacle du va-et-vient des pêcheurs dans la
lagune, on tente une ballade à vélo mais le soleil de plomb a rapidement raison
de notre résistance à la chaleur. On préfère ainsi attendre le soir, pour une
ballade sur la gigantesque plage léchée par des vagues toujours puissantes. Le
vent balaye le sable et forme de longues trainées qui fouettent au passage nos
chevilles et mollets.
Tous les soirs, on fait également une cure de fruits de mer
et de poissons ultra frais. Les cuisines de l’hostel nous préparent de larges portions de thon cru ou cuit, de
dorade, de coques, de langoustes et autres crevettes, le tout à des prix plus
que corrects. Encore quelque chose qui nous manquait terriblement au Costa
Rica !
Bref, l’opération séduction du Nicaragua continue et on a
désormais hâte de quitter le Pacifique pour nous rendre cette fois au bord du Lago Cocibolca (alias le Lac Nicaragua)
dans une autre ville coloniale, encore plus connue, Granada.
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